Thiphanie Girault-Bath
Thiphanie Girault-Bath
Bateau de voile
Biographie
Il n’y a vraiment pas d’âge pour pratiquer ou essayer un nouveau sport. L’essentiel est de rester actif et en forme. Si vous aimez les vagues et le vent, il y a tant de plaisir à découvrir !
Je me souviens de mes cours de voile en CM1 à Paris, dans une école accueillant des élèves entendants. Nous avions une séance par semaine. J’adorais être dans le bateau optimist, sentir le vent et glisser sur l’eau. Mais je n’avais pas le droit de diriger : l’enseignante et l’entraîneur expliquaient que la voile était trop risquée pour une personne sourde, à cause des nombreux coups de sifflet et de la complexité de la communication sur l’eau. Je restais donc à l’avant du bateau, et finissais souvent avec un coup de soleil d’un seul côté à force de ne pas bouger !
J’aurais aimé prendre la barre, mais je croyais à l’époque que la voile n’était pas faite pour les sourds, car je ne voyais aucun modèle à suivre. Plus tard, je ne me suis pas vraiment posé la question. Mon temps était surtout consacré aux études et au rattrapage scolaire, souvent sans interprètes.
En grandissant et après avoir déménagé au Canada, j’ai eu accès à des interprètes au secondaire. Cela m’a permis de me libérer du temps pour moi : faire de l’art, découvrir les sports de plein air comme le ski de fond, le vélo, l’escalade, le ski alpin et la randonnée. J’aimais explorer la région de l’Outaouais et profiter de la liberté qu’elle offrait. Je continue aujourd’hui à pratiquer ces activités avec passion.
Aujourd’hui maman de deux enfants de 10 et 12 ans, nous partageons en famille une passion pour le plein air et avons exploré ensemble une multitude de sports. Mes enfants ont découvert leurs propres passions : les sauts d’obstacles à cheval, la voile et l’escrime.
C’est grâce à mon fils, qui participe à des compétitions en optimist, que l’envie de refaire de la voile m’est revenue. En l’accompagnant, je me suis replongée dans mes souvenirs d’enfance, notamment les vagues de la Méditerranée et les jeux avec ma planche. J’ai donc pris contact avec l’École de voile Grande Rivière pour suivre des cours pour adultes, avec interprètes. J’ai complété les niveaux Can 1 et Can 2.
À proximité de cette école, j’ai rencontré des passionnés de kitesurf, de planche à voile et de wing foil. En hiver 2024, j’ai débuté une formation en kitesurf, puis je me suis tournée vers le wingsurf l’été suivant. Cela fait maintenant un an que je m’entraîne (ski alpin l’hiver, sports nautiques l’été), et je prévois suivre un cours de perfectionnement en wing foil cet été, accompagné(e) d’un mentor.
J’ai également eu la chance de participer à des sorties en voilier de croisière avec des amis passionnés, ce qui m’a permis de découvrir la navigation en mer autrement. Cet été, je vais enfin passer mon brevet de croisière élémentaire, après deux ans de tentatives d’inscription — plusieurs écoles étaient hésitantes à m’accueillir en raison des défis de communication en mer, notamment en cas de tempête ou de vents forts.
Heureusement, Robert, de la compagnie Capitaine Jack à Pointe-Claire, a accepté de m’accompagner. Thierry Labonté a généreusement proposé de faire du bénévolat pour interpréter les heures de formation. Sa passion pour la voile est un véritable moteur et une source d’encouragement. Sans leur soutien, je n’aurais pas pu poursuivre cette aventure.
Être une femme sourde dans le monde de la voile demeure un défi, surtout pour s’intégrer parmi les autres propriétaires de voiliers. Mais je continue à avancer.
Je possède un vieux voilier de 25 pieds, et ma famille me soutient entièrement dans cette démarche. Cet été, j’espère avoir l’occasion de naviguer plus souvent en équipe et de progresser davantage.
Ambitions et partage
Je souhaite participer au Deaf Sailing Championship dans trois catégories :
Planche à voile (semblable au wingsurf)
Laser en solo (grâce à mes certificats Voile Can 1 et Can 2)
Petit voilier en équipe (3 à 5 personnes, avec mon brevet élémentaire)
Mon objectif est de développer des techniques de communication sécuritaires pour tous, d’améliorer mes compétences en mer dans toutes les conditions, et de m’investir dans les sports liés au vent.
À long terme, j’aimerais enseigner la voile à d’autres personnes sourdes, car les ressources sont très limitées au Québec. Je connais quelques passionnés en Ontario et en Colombie-Britannique — peut-être pourrions-nous former une équipe canadienne d’un océan à l’autre !
Je suis encore débutante, mais très motivée à poursuivre ces sports pendant des années, à progresser, à partager cette passion et à inspirer d'autres à oser.
Je prévois participer à ma première compétition régionale cette année — et ce ne sera que le début !
Je suis enthousiaste à l’idée de transmettre cette passion à la prochaine génération et de voir mes enfants s’épanouir dans leurs propres aventures sportives. Leur énergie et leur détermination m’inspirent chaque jour.
En participant à des compétitions et en m’impliquant dans la communauté des sports nautiques, je souhaite aussi sensibiliser à l’inclusion des personnes sourdes dans ces disciplines. Mon rêve : voir naître davantage de programmes accessibles et inclusifs, pour que d’autres puissent ressentir la joie et la liberté que le sport procure.
Chaque sortie sur l’eau est une opportunité d’apprendre et de se dépasser. La voile et les sports nautiques ne sont plus un simple passe-temps pour moi : ce sont des passions qui nourrissent mon esprit et enrichissent ma vie.
Je suis profondément reconnaissante envers ma famille, mes amis et ceux qui m’encouragent à poursuivre mes rêves. Ensemble, brisons les barrières. Ensemble, créons un monde où tout le monde peut aller au bout de ses ambitions — peu importe les obstacles.
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